Interview de Pierre LEVALLOIS, nouveau MCF à l'IRENEE

mer, 03/17/2021 - 10:18 -- Nathalie ABSALON

Bienvenue à Pierre LEVALLOIS, nouveau maître de conférences en droit public à l'IRENEE depuis septembre 2020 qui a répondu à nos questions à l'occasion de la Newsletter #10 - Printemps 2021.
 

• Quel est votre parcours et quels champs d’études ont influencé vos recherches ?
J’ai suivi un cursus classique en droit public à l’Université Lyon 3. Après un master 2 recherche (droit public fondamental) j’ai naturellement choisi de poursuivre en thèse, sous la direction du Professeur Caroline Chamard-Heim. Ayant débuté mes travaux sans financement, j’ai d’abord été assistant de justice à la Cour administrative d’appel de Lyon avant de passer avec succès l’examen d’accès au CRFPA. J’ai ainsi suivi la scolarité à l’école des avocats en parallèle de mes travaux de thèse. Une fois le CAPA obtenu, j’ai néanmoins pu me concentrer uniquement sur l’Université à la faveur de deux contrats d’ATER. Avant d’être qualifié par le CNU, j’ai encore occupé un poste d’enseignant-chercheur « LRU » à l’Université de Nîmes. Cela m’a d’abord permis de vivre de mon métier et, ensuite, d’enrichir mon CV afin de préparer au mieux mon recrutement à l’Université de Lorraine.

• Pouvez-vous nous exposer la problématique de votre thèse ?
Ma thèse porte sur une question persistante et pourtant irrésolue du droit administratif : l’entreprise publique doit-elle se résoudre à abandonner la forme de l’établissement public ?
J’y défends la thèse selon laquelle la crise que traverse l’entreprise en forme d’établissement public révèle les faiblesses d’un modèle, l’EPIC, qui apparaît certes dépassé, mais qui reste toutefois susceptible d’évoluer. Dans une démarche que j’ai voulu résolument prospective, je propose de tirer profit des forces et des faiblesses de l’EPIC afin d’inventer une nouvelle forme juridique.
Questionnant l’appréhension même de l’interventionnisme public par le droit administratif, la thèse suggère d’abord l’avènement de la notion de service public marchand. Réconciliant l’entreprise et le service public, elle constituerait un terreau fertile pour l’édification de l’établissement public marchand, une personne publique entièrement tournée vers l’activité économique. Cette vocation au marché commande le respect d’une ligne directrice simple dans l’élaboration de son statut : le droit privé s’applique aussi longtemps que les nécessités du service public n’imposent pas l’instauration de règles exorbitantes. Au plan opérationnel, la gouvernance de l’entreprise en forme d’établissement public a été repensée. La souplesse du régime de l’établissement public marchand s’affirme en outre par la possibilité de recourir à l’arbitrage, la diminution du périmètre de son domaine public et la levée de l’insaisissabilité de ses biens. La garantie implicite que lui reproche le droit des aides d’État a enfin été écartée par la soumission de l’entreprise à un régime spécifique de faillite, tenant compte de sa qualité de personne publique comme des spécificités de son activité de service public marchand. Émerge donc de ce premier travail de recherche une entreprise en forme d’établissement public rénovée, affranchie des contraintes de l’EPIC et je l’espère, pleinement opérationnelle.

Retrouvez la thèse de P. LEVALLOIS, L'établissement public marchand. Recherche sur l'avenir de l'entreprise en forme d'établissement public, éditions Dalloz (publiée en avril 2021).

• Quels sont vos projets au sein de l’IRENEE ?
Je suis très heureux d’avoir intégré l’IRENEE car mes travaux s’accordent bien avec son thème de recherche « Mutations des institutions et des organisations ». C’est vrai pour ma thèse, laquelle porte sur l’évolution des institutions administratives par lesquelles l’État intervient directement dans l’économie. Mais c’est également le cas pour mes autres travaux. Globalement, c’est tout le champ du droit public économique qui m’intéresse, et pas seulement son volet relatif aux entreprises publiques ou au droit de la concurrence. Mes recherches m’entraînent ainsi dans des champs voisins dont la maîtrise me semble indispensable afin d’appréhender l’action économique de l’État : cela concerne notamment le droit des contrats publics et le droit des biens publics. C’est d’ailleurs dans cette dernière discipline que s’inscrit mon premier projet collectif au sein de l’IRENEE, puisque nous organisons avec mon collègue Pascal Caille une journée d’études relative aux ajustements contemporains du droit de l’ouvrage public. Elle se tiendra à Metz le 14 octobre 2021.

• Quel(s) conseil(s) donneriez-vous à nos jeunes chercheurs ?
Je crois qu’ils devraient être conscients que si nous faisons probablement l’un des plus beaux métiers du monde, il nous demande un investissement personnel très important. C’est particulièrement le cas de la thèse. À mon sens, le doctorat doit vraiment être vécu comme une formation – ce qu’il est d’ailleurs – dans laquelle chacun est appelé à progresser et à se dépasser afin de développer de solides compétences de chercheur. Mon conseil, si je devais en donner un, serait donc de redoubler de travail pendant les années de thèse et de toujours s’accrocher, quitte à emprunter des chemins détournés. Car s’il est vrai que la concurrence s’accroît chaque année, le jeu en vaut indéniablement la chandelle.

Catégorie: 
Entretien

Menu principal